01 juin 2019

Journal de ma francophonie #1 - intro + Verner (Ontario)



Introduction
En janvier 2006, j’ai pris trois mois de congés sans solde pour écrire. Je devais travailler sur un projet de roman-feuilleton, j’avais besoin de temps et de concentration. J’ai donc quitté l’agence de publicité où j’étais concepteur-rédacteur pour me concentrer sur ma fiction.
Fin mars, j’avais bien avancé, mais je voulais que cela continue, j’ai alors donné ma démission pour me retrouver travailleur indépendant. Mon revenu a été coupé par trois, mais je n’ai jamais regretté. Je suis devenu un vrai écrivain à plein temps.
Comme j’écrivais des livres pour les jeunes, je me suis fait connaître pour donner des ateliers. Il existe au Québec un programme intitulé La Culture à l’école, où je me suis inscrit, y proposant des animations pour les écoles primaires et secondaires, autour du roman policier.
Dix ans plus tard, mes animations scolaires sont ma principale source de revenus. J’ai appris ce nouveau métier en improvisant, mais je l’aime et j’en suis fier. Je me sens utile.

Pendant l’année scolaire 2016-17, mes ateliers m’emmèneront du Québec en Ontario, et de la Suisse au Yukon, en passant par la France.
J’ai eu envie d’écrire le journal de ce périple vu de l’intérieur, au cœur des communautés francophones du Canada et de l’Europe, en me posant des questions simples. Comment les jeunes franco-ontariens vivent-ils leur francophonie? Et les élèves québécois? Les Suisses? Parler français au Yukon est-il chose facile? Notre langue est-elle menacée ou a-t-elle encore de beaux jours devant elle?
L’état de la francophonie ne cesse d’alimenter l’actualité québécoise. Avons-nous raison de nous inquiéter ou devrions-nous plutôt nous rassurer en voyant ce qui se passe dans les autres provinces canadiennes?
Je veux répondre simplement avec des exemples concrets tirés de mon quotidien. Je serai bien placé pour en témoigner, observateur et acteur privilégié.
La contrainte : écrire à chaud, le soir dans ma chambre d’hôtel ou à mon retour à la maison. Tenter de cerner un état de la francophonie vu des écoles primaires et secondaires.

Première étape : Verner (Ontario) – 23 novembre 2016
Je participe depuis 4 ans au programme auteurs-écoles du ministère de l’éducation ontarien. Chaque année, on envoie des écrivains francophones aux quatre coins de la province. Il s’agit d’animer un atelier d’écriture de nouvelles de science-fiction, au cours de six visites dans la même classe.
Aujourd’hui, c’est ma deuxième visite à École élémentaire catholique Ste-Marguerite d’Youville à Verner. Le nom français de la ville est Nipissing Ouest.
Je suis arrivé hier en avion depuis Montréal, via Toronto, jusqu’à North Bay. Je loge à l’hôtel 8 Stars, j’ai une voiture louée; tout est très bien organisé. Il faisait froid, je ne connaissais pas les lieux, mais avec mon téléphone intelligent, ça s’est bien passé.
Ce matin, j’ai roulé 60 km jusqu’à l’école.
Mon atelier commence à 9 h. Les cours débutent à 8 h 45 par l’écoute du Ô Canada, suivi d’une prière (nous sommes dans une école catholique) et des annonces du jour. J’attends à la réception. Je sais tout de suite que la ville est vraiment francophone. La secrétaire, les enfants, les professeurs : tout le monde parle très bien français. Après vérification sur Wikipédia en français, j’apprends que Verner est à 63 % francophone. (D’après la version anglaise, « It is the most bilingual community in Ontario, with 73.4% of its population fluent in both English and French. ») Bref, ses 13 300 habitants y parlent beaucoup français.
Le cours débute avec un petit exposé de la tâche du jour : rédiger le plan et la description des personnages. Les élèves doivent écrire leur nouvelle de science-fiction d’ici fin février.
Je suis aidé par le professeure et son assistante. Comme il y a trois groupes formés, on se répartit facilement la tâche. Je pousse les jeunes à concevoir une histoire qui se tient. Logique, mais avec toute la liberté que permet la science-fiction. Sans se consulter, les trois équipes partent sur des aventures en vaisseaux spatiaux. On aura des extraterrestres, des robots méchants, un trou noir, etc. Je ne corrige pas l’orthographe; je réserve cette partie pour l’écriture proprement dite. Je ne veux pas les décourager dès le début. Mais je trouve qu’ils se débrouillent plutôt bien. Ils écrivent sur des tableaux blancs qu’ils photographient avec leur tablette numérique. Ils utiliseront celle-ci la semaine prochaine pour entamer la rédaction.
À 11 h 30, la cloche sonne. J’ai fini mon intervention. Les plans sont bien ficelés, les personnages amusants. Il y a bien sûr des clichés, mais le potentiel est là. Les élèves sont super motivés et moi avec.
Je retourne à North Bay en écoutant ACDC et The Cranberries sur Moose fm. La 17 est une interminable ligne droite.

À suivre...
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