Je suis parti de Montréal depuis presque sept
mois. Pour mieux y revenir. Je voyage, j’écris, j’apprends. Depuis trois mois,
un mouvement de contestation étudiant sans précédent s’est déclenché, a enflé,
ne dérougit pas. En réaction à une scandaleuse augmentation des frais de
scolarité, des centaines de milliers d’étudiants se sont mis en grève. La plus
longue grève de ce type dans l’histoire du Canada. Et face à cet élan, le
gouvernement refuse de négocier, de parler. Quand un tel mouvement envahit une
jeunesse, comment un pouvoir peut-il le nier ? La démocratie, ce n’est pas
juste voter et fermer sa gueule pendant quatre ans.
Nos deux enfants étudiants sont dans cette
grève, comme tant d’autres. De loin, je suis ce mouvement pas à pas, je n’en
manque rien, mais je ne peux manifester avec eux. Au début, je me disais que
cette grève était celle des étudiants, pas de leurs parents. Aujourd’hui, les
revendications sont celles d’un peuple qui refuse une approche néo-libérale rétrograde.
Je suis solidaire.
Et puis, ce 17 mai 2012, cette loi couperet
est votée. Je suis abasourdi. Pas dans le Québec où j’ai choisi de vivre !
Où j’ai choisi de m’installer depuis 20 ans. Où j’ai ma famille, mes amis, mes
collègues.
Je suis devenu écrivain en arrivant à Montréal.
Je suis devenu un autre homme. Partout où je vais, je suis un ambassadeur de ce
pays que j’adore. Mais là, je ne peux que raconter à ceux et celles que je
rencontre que mon pays est devenu fou, qu’il régresse avec une loi bâillon, un
coup de matraque dans les gencives de la liberté de manifester, de penser, de
se réunir, de protester.
Je rentre à Montréal le 5 juin. J’ai
l’impression que je vais débarquer en terre étrangère, dans une Hongrie de 1956.
Je suis présentement à Berlin. Le mur est tombé depuis 1989. La vie est calme,
les gens semblent heureux. Ce soir, on va regarder un match de foot. Mais je
pense à mon Québec devenu malade à cause d’un chef mégalo, autoritaire,
dangereux.
Carré rouge sur fond noir.
BRAVO !
RépondreSupprimerEvelyne
Au Québec, on n'a jamais manifesté dans la violence. Pour qu'on en vienne là, le gouvernement devrait comprendre que l'heure est grave, qu'il doit tendre l'oreille... Mais non, il nous enfonce la tête dans la boue.
RépondreSupprimerEn cette veille des Patriotes, c'est douloureusement ironique.